Trouvé un délicieux petit ouvrage traitant de mon très provisoire métro-boulot[-dodo]. Je vous en offre même les premières pages au style alerte qui décrivent bien mieux que je ne ferais le quartier que je traverse en courant d’air matin et soir. Robert Belleret, auteur de cet autobiographique Les bruyères de Bécon est grand reporter au Monde et plus connu pour être le biographe de Léo Ferré et l’auteur d’un roman Sixties qui fleure bon lui aussi la génération qui m’a précédée. Notice de l’éditeur (je suis vraiment fainéant aujourd’hui !) :
« Dans ces mémoires d’un jeune homme dérangé, Robert Belleret livre un itinéraire d’adolescent glandouilleur, fauché, timide mais exalté, tout au long des années soixante. De l’entrée au lycée à l’embauche dans un journal, en passant par la case caserne et les boulots de gratte-papier indocile, Sixties se lit comme un roman de formation. Le music-hall, le Livre de poche et le septième art ayant constitué les universités de l’auteur, Aznavour, Hemingway, Godard, Bébel et B.B., les Beatles et les Stones, Léaud et Léo et tant d’autres « maîtres » figurent au générique de ce cinéroman constamment irrigué par le cinoche – celui qu’on regarde avec les yeux et celui qu’on se fait dans sa tête. Sans jamais se donner le beau rôle dans ses tribulations d’acteur anonyme – virées entre copains, amitiés fondatrices, élans amoureux chaotiques, premiers baisers, errances banlieusardes et voyages au bout du monde -, Belleret est aussi le témoin attentif de l’ère des ruptures où de Gaulle et les deux K (Khrouchtchev et Kennedy) dominent le paysage. Il brosse ainsi la chronique, juste, drôle et trépidante d’une époque – du yé-yé triomphant à la grande chanson française, du dernier flot des westerns à la Nouvelle vague, du rock à la pop, des scoubidous aux minijupes, de la sale guerre d’Algérie au joli mois de mai – dont l’image n’est pas près de se ternir. »
Pour ma part, à 45 ans, je commence seulement à développer un sentiment générationnel. Sans doute nous, adolescents des années 70, avons-nous trop vécu à l’ombre écrasante de nos aînées – tel ce Belleret – pour revendiquer une histoire collective. Qu’avons nous fait d’historique si ce n’est de porter la gauche au pouvoir sous les traits d’un Mitterand en 81 ? Au travail j’ai toujours progressé avec ma tranche d’âge, ces quadragénaires qui forment aujourd’hui le middle-management des grands groupes. Sans enfants je n’ai pas vécu la distance parentale. Le sentiment de ne plus être spectateur mais de faire partie de l’Histoire du monde, même de manière infiniment ridicule, je le découvre seulement maintenant, dans la confrontation à d’autres générations, à d’autres problématiques, dans ces instants où je me surprends à prononcer un fatidique « de notre temps…«