Déc 132005
 

Retrouvé mes sympathiques collaborateurs directs après deux longs mois d’absence. Avec cette distance et à écouter les mille et une nouveautés qu’ils m’annoncent il me parait encore plus évident que le temps des organisations immuables est définitivement révolu ; c’est une banalité de dire que le comportement des entreprises est confronté aux lois du marché mondial et à l’inflation de réglementation sources de remise en cause permanente.

Premier exemple anodin : il y a quinze ans, on fumait sans complexe dans les salles de réunion et on tolérait la cigarette du collègue de bureau. Après la Loi Evin, on a discrètement dirigé ces empesteurs vers des fumoirs. Aujourd’hui je découvre une batterie de cendriers géants devant le hall d’entrée. Les salariés d’il Leone n’ont d’autre choix que le trottoir pour s’en griller une, au froid et en butte à la réprobation générale. De quoi briser la dernière vraie solidarité catégorielle des entreprises (celle des fumeurs) !

Autre exemple plus significatif la charte éthique du groupe récemment traduite et diffusée en France. Elle démontre à quelle rapidité l’entreprise épouse (récupère diront certains) les mouvements de la société civile quitte au passage à les affadir. Dans ces exercices de style communs à beaucoup d’entreprise(*) qui donnent un sens nouveau au statut de personne morale, on aimerait tout autant savoir en quoi un groupe participe au développement harmonieux de la planète (éthique de l’activité) que lire un règlement amélioré amalgame digest de textes de loi récents (éthique du fonctionnement)(**). Mais pour cela il faudrait que soit écrit ce qu’on entend par développement harmonieux définition qui incombe à une gouvernance mondiale introuvable en tant que telle aujourd’hui. Mais ne boudons pas notre plaisir. Qui aurait imaginé lire un jour dans un document de référence d’une entreprise ‘The Group is committed to safeguarding the environment as a primary asset.’ Il est vrai qu’il est plus facile pour une compagnie d’assurances de tenir un tel discours que pour une industrie chimique…

Autre remarque sur la charte Generali : il est plus que symbolique qu’elle ait été décrétée depuis Trieste pour s’imposer à l’ensemble des compagnies du groupe dans le monde. On est clairement dans une ère qui dépasse la mondialisation par les biens pour toucher le domaine des idées et des comportements. L’économie, épaulée par la communication, est certainement aujourd’hui le plus fort vecteur de nivellement culturel loin devant les hordes de soldats et d’évangélisateurs.



(*) quelques exemples de chartes éthique :
Charte de la manufacture d’orgue Kuhn, la plus décalée
Charte de Brantano, sans chausse-pied !
Charte de Suez, classique et à tiroirs
Charte d’AXA, franchement fouillis, l’élève Generali a clairement dépassé le maître.

(**) les chartes font indirectement référence au corpus législatif sur les discriminations à l’embauche, le sexisme, le harcèlement, les délits financiers, la réglementation sur l’environnement… Il est curieux qu’elles formulent l’esprit des lois.