Dans les pays où l’électricité est rare et où le climat vous plonge dans une torpeur dès la fin de la matinée, l’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt. Se pointer au bureau à 9h30 comme à Paris serait totalement incongru ; pas de panne d’oreiller possible, dès l’aube la rumeur de la ville se charge de vous rappeler les bons principes. Ainsi je m’éveille chaque jour vers 5h30. Je paresse un peu sous la moustiquaire avant d’allumer mes deux plaques électriques ; une pour chauffer l’eau de la toilette, l’autre pour le thé. Le petit-déjeuner comprend invariablement yoghourt et jus de fruit mozambicain, a vaca que ri et infusion de Honeybush et Rooibos sud-africains bien meilleure que le thé local. Je prends tout ça tranquillement, le ventre ceint d’un long capulana pour me prémunir des moustiques l’oreille collée sur RFI. Lorsque l’eau est chaude, commence la toilette dans la baignoire asséchée. Friction au savon d’Alep de la tête au pied et rinçage à l’eau tiède puisée d’une grande bassine à l’aide d’un broc plastique hideux. Au bout de deux mois d’un tel régime je rêve d’un hammam.
Le temps de m’habiller il est 7h30 l’heure de me rendre au bureau tranquillement, à pied, non sans avoir verrouillé la porte et la grille en fer qui fait office de blindage. Bom dia, le gardien m’ouvre le portail de l’immeuble. Dans les communs les petites bonnes s’activent déjà au ménage. Je suis le seul à ne pas en employer une ce qui n’est pas très bien vu. Je me fais fort chaque jour de changer d’itinéraire autant par plaisir que pour raisons de sécurité. La suite d’une journée ordinaire un autre jour ordinaire…
En parlant de jours trop ordinaires, Médecins du Monde lance un blog Quand l’oubli devient manifeste pour débattre du rôle des médias sur les populations et les crises oubliées. Un article cite l’économiste Esther Duflo : « Une catastrophe ayant eu lieu sur le continent africain a besoin de 48 fois plus de victimes pour être autant couverte par la télévision (…) qu’une catastrophe ayant eu lieu en Amérique ou en Europe ». Vaste débat sur une des nombreuses iniquités de ce monde.