Si les coteaux des Cameron Highlands continuent à être intensivement défrichés au détriment de la forêt vierge c’est pas seulement pour le thé mais pour y faire pousser les fruits et légumes des pays tempérés. La stabilité du climat permet de s’abstraire des saisons et d’approvisionner KL et S’pore toute l’année. J’ai visité une ferme d’un genre nouveau qui pratique la culture hydroponique. Sous de vastes serres on voit grandir sous nos yeux fraises et laitues dont les racines baignent en permanence dans l’eau. On jure qu’elle s’effectue sans pesticide, des sticks de glu étant disposés très régulièrement pour piéger les insectes. Les variétés produites seraient ainsi très robustes et conviendraient parfaitement aux longues croisières maritimes.
Chacun jugera ce type de culture contestera ou s’enthousiasmera de ces nouvelles techniques. Le but du voyage au présent n’est pas de rendre un jugement mais de montrer, expliquer les enjeux et les choix réalisés par certaines sociétés, voire présenter des arguments contradictoires. A chacun ensuite d’en tirer les conclusions pour sa propre réflexion et son action.
En ce sens l’ouverture d’une ferme expérimentale au public m’a semblé tout à fait judicieuse comme le serait l’accès à des fermes plus traditionnelles, des plantations de palmiers à huile ou d’hévea, des usines, etc…
Le concept a été baptisé agro-tourism.
Dans le même ordre d’idée, ceux qui pensent que le bio n’est qu’un concept bourgeois et occidental seraient surpris de constater qu’en Malaisie ce secteur commence à se développer. Il existe des ouvrages en mandarin sur le thème et même des boutiques(**). Il serait intéressant de comparer les arguments utilisés, la clientèle concernée en tenant compte par exemple de la sensibilité végétarienne traditionnelle d’une partie des Malaisiens.
Toujours sur ce thème de l’alimentation, se tenait à KL un événement important début mai : le salon du halal. Ne souriez-pas. Il ne s’agit pas d’une vulgaire foire aux bestiaux. Les enjeux économiques sont colossaux compte tenu du marché que cela représente au niveau mondial. La tendance est à la certification, à l’harmonisation des standards transnationaux pour que les pays producteurs généralement pauvres puissent accéder aux marchés des pays très consommateurs et plutôt riches (le Golfe par exemple). Dans cette guerre plus économique que religieuse, un nouveau concept est né : l’intégration. Ce n’est plus seulement l’abattage qui doit être conforme au rituel, mais toute la filière qui doit être garantie islamique. De l’alimentation des cheptel jusqu’à la gestion financière ! On révèle pour l’occasion que 5% des producteurs de viande halal seulement utiliseraient des banques islamiques(***) pour gérer leurs comptes en banque.
Tout ça rappelle – avec d’autres motifs – les préoccupations du commerce équitable.
(*) Big red strawberry – Farm and Gift center. Brinchang. Cameron Highlands.
(**) Gamme de produits et boutiques d’organic food Melilea. Centre commercial de Malacca.
Également : Long life magazine en mandarin sur la santé. Longlife : http://longlife.lifepub.com.my
(***) Les banques islamiques se distinguent des banques classiques en ce qu’elles introduisent des dispositifs visant à respecter les principes coraniques, entre autres l’interdiction du prêt à intérêt.
Pour citer cet article (format MLA) : Traynard, Yves. « Agro-tourism, bio et halal ». ytraynard.fr 2024 [En ligne]. Page consultée en 2024. <https://www.ytraynard.fr/2007/05/agro-tourism-bio-et-halal/>