C’est avec empressement que j’avais répondu favorablement à la proposition d’interview d’une sociologue destinée à orienter le festival Cinéma du Réel. Je devais bien une heure de questionnement à ce festival qui ne mérite que des encouragements. D’autant qu’en mars il m’avait offert une centaine d’heures de projections passionnantes dans les salles obscurs de Beaubourg(*).
Et puis cet entretien représentait pour moi l’opportunité de faire le point sur l’intérêt de tels festivals et du documentaire en général.
Il me parait que le cinéma du réel – au-delà de la richesse des sujets abordés – est d’abord un apprentissage du regard. Apprendre à voir le monde, à le découvrir, à travers l’œil exercé d’un autre soi-même, mais différent ; celui de réalisateurs exigeants, critiques, qui essaient d’échapper au format TV, à ce mode « reportage » où la voix off dit tout, ne laisse aucune liberté d’interprétation au spectateur, fait table rase du doute, de la complexité, de la contradiction même du monde et des ses acteurs. Au contraire on voit s’épanouir dans les documentaires présentés au festival un espace d’expression respectant les « personnages » du réel, leur sensibilité, évitant ou détournant clichés et caricatures, cherchant d’autres sujets que ceux convenus.
Il faut relever aussi le travail remarquable de cinéastes du Sud qui, se saisissant des moyens audiovisuels, décrivent enfin leur univers et le portent à la connaissance du monde. Ce mouvement est synonyme d’espoir dans un monde globalisé qui doit apprendre plus que jamais à cohabiter et se débarrasser du regard hautain de l’Occident.
Je formule le vœu que ces moments de cinéma puissent dépasser le cadre étroit du festival encore trop élitiste et être accessibles à tous grâce aux techniques de Vidéo à la demande (VOD) par exemple(**), ou mieux soient diffusés par des chaînes à l’occasion de l’évènement.
(*) voir Cinéma du Réel J1 du 7 mars 2008 et billets suivants
(**) Accès aux documentaires :
– BPI Catalogue de documentaires,
– Arte VOD en consultation partielle à la BPI Beaubourg,
– La Maison du doc à Lussas.
Pour citer cet article (format MLA) : Traynard, Yves. « Les pompiers y sont plus forts que les keufs ». ytraynard.fr 2024 [En ligne]. Page consultée en 2024. <https://www.ytraynard.fr/2008/07/les-pompiers-y-sont-plus-forts-que-les-keufs/>