Il y a plusieurs moyens de revivre l’actualité des 50 dernières années de son quartier, pour peu qu’il soit célèbre ! Sauf à mener l’enquête auprès des Anciens, les archives audiovisuelles de l’INA présentent une manière à la fois rapide et vivante d’accèder à cette mémoire. Ainsi, une requête Belleville auprès du prestigieux archiviste national propose 107 vidéos à la consultation. La plupart sont des brèves d’actualité mais il y a aussi des reportages complets(*).
Le premier constat que l’on peut tirer de cette matière porte sur la sur-représentation du Bas-Belleville, infime portion du Belleville historique. Le carré compris entre le parc de Belleville, la rue et le boulevard homonymes semblent accaparer toute l’actualité. Le deuxième constat, plus subjectif, porte sur l’image du quartier. Une image très forte, mise en avant par les médias, qui a accompagné la transformation sociale et urbanistique de Belleville de l’insalubrité à sa gentrification. Cette image valorise le village populaire, la cohabitation harmonieuse des communautés, l’enfance de célébrités, l’héritage de la Commune et le refuge des artistes.
Petite chronologie de Belleville à travers ma sélection d’archives (un clic et vous y êtes).
- 1956 : le constat de l’insalubrité,
- 1961 : les manifestations musulmanes à la veille de l’indépendance de l’Algérie,
- 1965 : première mémoire du quartier alors que la destruction bat son plein dans un vaste mouvement qui affecte toute l’Ile de France, évocation du lien social qui disparait et d’artistes célèbres : Maurice Chevalier, Régine, Mouloudji, Edith Piaf, Willy Ronnis
- 1966-1968 : l’émancipation des « jeunes » : la déferlante rock et la maison des jeunes des Hauts de Belleville,
- 1968 : affrontements juifs-musulmans sur fond de guerre israélo-arabe,
- 1973 : la prise de conscience d’un monde qui disparait sous les pelleteuses ; la dénonciation des promoteurs par Clément Lepidis,
- 1973-1981 : la difficulté à cohabiter, le racisme, les migrants en question,
- 1987 : Belleville, un nouveau Chinatown à Paris ; le remodelage des communautés,
- 1988 : ouverture du jardin de Belleville,
- 1989 : le discours sur la bonne entente des communautés, et l’intégration dans les nouveaux logements sociaux
- 1990-1995 : le combat de la Bellevilleuse contre la ZAC Ramponeau-Belleville jusqu’à l’annulation du projet,
- 1996 : première mention TV des portes ouvertes des ateliers d’artistes (initiés en 1990), puis l’accord sur la réhabilitation de la Forge
- 2001 : la touristification du quartier avec les visites de Paris insolite,
- 2003 : la prise en charge des chibanis, migrants maghrébins atteignant le troisième âge.
Le archives s’arrêtent en 2004. On y trouvera sans doute dans quelques années :
- 2005 : bobos et gentrification,
- 2007 : la chasse aux parents sans-papiers d’enfants scolarisés.
P.S. : les archives de Belleville puisées à l’INA n’ayant pas vocation à être représentatives cette chronologie qui s’inscrit dans celle plus large de la société française est certainement imparfaite et ne constitue en aucun cas une référence.
P.S. : pour l’histoire de la rue Ramponeau c’est sur Wikipédia. N’hésitez pas à compléter cette notice collaborative que j’ai initié.
(*) Belleville aux archives de l’INA : 107 documents à ce jour pour la plupart visionnables en libre accès.