Question à Jean-Pierre Coffe(*) en marge de l’exposition Perrette et le tracteur qui vient de fermer ses portes.
Comment percevez-vous l’utilisation de l’image du paysan dans la publicité et les médias aujourd’hui ?
Le paysan dans la publicité me fait penser à certains moines utilisés pour vendre des fromages médiocres. La publicité donne une image démodée et injuste du jeune agriculteur entreprenant. Quant aux médias, pour la plupart,ils me semblent peu informés de la réalité paysanne moderne.
Dans quels médias trouve-t-on une analyse sérieuse et comparée entre les revenus et les aides que perçoivent les céréaliers, les éleveurs et les laitiers ?
L’exposition(**) et son riche catalogue s’attachent d’abord à nous montrer combien le regard que nous posons sur le monde rural et agricole est stéréotypé. C’est ce que relève
Jean-Luc Mayaud dans sa préface :
« le regroupement thématique de ces documents renforce le constat d’une forme de permanence de la représentation dans la durée longue de deux siècles au moins. Or cette constance est très justement ce que les responsables du choix des images et rédactrices des notices déconstruisent pour la rendre intelligible au fil de la lecture. En dépit de l’existence des documents et du discours que ceux-ci induisent, le paysan éternel n’existe pas : les auteurs affirment donc avec justesse que cette figure sans cesse convoquée et réinventée relève de la mythologie et de la construction idéologique.
Les auteurs proposent trois « portes d’entrée » pour analyser cette mise en scène du monde rural et agricole français : « Le paysan éternel », « les symboliques de la terre », « Du paysan à l’agriculteur ».
Nourri de documents graphiques d’une grande richesse, le catalogue de l’exposition nous interroge sur le regard que nous posons sur la
figure du paysan laquelle, comme le précise Claudine Chevrel,
« a surtout été façonnée par et pour les citadins (…) et imposée aux ruraux qui ont parfois du mal à s’y reconnaître ».(***)
Il viendra un temps où l’on s’apercevra que les clichés de nos brochures touristiques sont tout aussi fatals aux habitants du Sud.
(*) En vue, octobre 2008, n°31. Quand Jean-Pierre Coffe se met au vert.
(**) Perrette et le tracteur, le paysan dans la publicité. Bibliothèque Forney. 1, rue du figuier Paris 4e. Du 23 septembre 2008 au 3 janvier 2009. Fermetures les 1er et 11 novembre, 25 décembre 2008 et 1er janvier 2009. Du mardi au samedi de 13h à 19h. Entrée : 4 euros / 2 euros (tarif réduit). De nombreuses rencontres autour du monde rural aujourd’hui et de la crise alimentaire seront proposées en novembre et décembre prochains.
(***) Extrait du riche site de la mission d’animation des agrobiosciences.