Fév 072009
Dans 10 jours je quitterai mon pays et, bien que rejoignant l’État le plus peuplé du monde, je me confronterai finalement qu’à une infime portion des habitants de notre planète. Dans ces conditions, comment se représenter l’humain dans sa diversité ? Le projet 6 milliards d’Autres qui fait étape au Grand Palais(*) tente de répondre à cette question ambitieuse.
Après La Terre vue du ciel, ce nouveau projet planétaire de Yann Arthus-Bertrand s’attache non aux paysages mais à ses habitants. Et puisque la terre est vaste, les auteurs ont procédé par sondage. Et puisque les humains sont bavards ils en ont ramené de très longs extraits vidéos au point que l’exposition propose un « pass illimité » permettant d’espérer, à l’issue d’un marathon d’une vingtaine d’heures, entendre tous les témoignages. Le plus simple est sans doute de piocher tranquillement à la maison tous ces témoignages – et ceux d’internautes – sur le site du projet.
Les interviewés étaient tous soumis aux mêmes 40 questions dans l’esprit des ses sondages mondiaux décidément à la mode(**).
En vrac : quel est votre plus grand rêve, croyez-vous en Dieu, que souhaitez-vous transmettre à vos enfants, qu’est-ce que la nature représente pour vous ?
La méthode a évidemment ses limites. Le questionnaire universel non marqué culturellement par son géniteur, censé représenter la diversité n’existera jamais. Ainsi parle-t-on de Dieu au singulier, on questionne sur le pardon, l’argent, le pays, autant de termes qui recouvrent des sémantiques très différentes. Autre biais, à lire la liste des sondés, une juste représentativité des habitants de la planète n’a visiblement pas été la préoccupation du sondage. Il est vrai qu’à cette aune le tiers des sondés auraient été chinois ou indiens ; la diversité en aurait pris un coup ! On aurait aimé quelques mots sur ces limites méthodologiques dans une exposition censée représenter la population mondiale. Un comité scientifique, pour un projet d’une telle ampleur, n’aurait pas été un luxe.
Le plus malsain de ce qui est présenté comme une réflexion sur « la diversité humaine et culturelle » c’est qu’elle glisse sans le dire vers les interrogations du moment : changements climatiques, guerres, migrations, minorités, droits humains… Il y a une malhonnêteté à ne pas annoncer plus clairement la couleur idéologique.
C’est dommage, et j’arrête de faire la fine bouche, parce qu’on tient là réellement un bouillon d’idées, qui, si on regardait aussi de plus près les points où les paroles s’opposent plutôt qu’à les faire converger à tout prix, permettrait de mieux déceler les fractures du monde et d’amorcer un débat.
En tout cas à voir le trouble qui submerge les spectateurs dans les yourtes de fortune installées dans le grand palais, je pense que ça donne une idée de ce qu’on l’on attend de la rencontre de l’Autre visée par notre tourisme occidental : la conjugaison du sens et de l’émotion, le monde comme spectacle.
Après La Terre vue du ciel, ce nouveau projet planétaire de Yann Arthus-Bertrand s’attache non aux paysages mais à ses habitants. Et puisque la terre est vaste, les auteurs ont procédé par sondage. Et puisque les humains sont bavards ils en ont ramené de très longs extraits vidéos au point que l’exposition propose un « pass illimité » permettant d’espérer, à l’issue d’un marathon d’une vingtaine d’heures, entendre tous les témoignages. Le plus simple est sans doute de piocher tranquillement à la maison tous ces témoignages – et ceux d’internautes – sur le site du projet.
Les interviewés étaient tous soumis aux mêmes 40 questions dans l’esprit des ses sondages mondiaux décidément à la mode(**).
En vrac : quel est votre plus grand rêve, croyez-vous en Dieu, que souhaitez-vous transmettre à vos enfants, qu’est-ce que la nature représente pour vous ?
La méthode a évidemment ses limites. Le questionnaire universel non marqué culturellement par son géniteur, censé représenter la diversité n’existera jamais. Ainsi parle-t-on de Dieu au singulier, on questionne sur le pardon, l’argent, le pays, autant de termes qui recouvrent des sémantiques très différentes. Autre biais, à lire la liste des sondés, une juste représentativité des habitants de la planète n’a visiblement pas été la préoccupation du sondage. Il est vrai qu’à cette aune le tiers des sondés auraient été chinois ou indiens ; la diversité en aurait pris un coup ! On aurait aimé quelques mots sur ces limites méthodologiques dans une exposition censée représenter la population mondiale. Un comité scientifique, pour un projet d’une telle ampleur, n’aurait pas été un luxe.
Le plus malsain de ce qui est présenté comme une réflexion sur « la diversité humaine et culturelle » c’est qu’elle glisse sans le dire vers les interrogations du moment : changements climatiques, guerres, migrations, minorités, droits humains… Il y a une malhonnêteté à ne pas annoncer plus clairement la couleur idéologique.
C’est dommage, et j’arrête de faire la fine bouche, parce qu’on tient là réellement un bouillon d’idées, qui, si on regardait aussi de plus près les points où les paroles s’opposent plutôt qu’à les faire converger à tout prix, permettrait de mieux déceler les fractures du monde et d’amorcer un débat.
En tout cas à voir le trouble qui submerge les spectateurs dans les yourtes de fortune installées dans le grand palais, je pense que ça donne une idée de ce qu’on l’on attend de la rencontre de l’Autre visée par notre tourisme occidental : la conjugaison du sens et de l’émotion, le monde comme spectacle.
Et vous vous répondriez quoi… ?
(*) 6 milliards d’Autres. Exposition au Grand Palais à Paris du samedi 10 janvier au jeudi 12 février 2009. Témoignages recueillis par GoodPlanet.
(**) Voir mon billet : One more poll : the Greendex
Pour citer cet article (format MLA) : Traynard, Yves. « 6 milliards d’Autres ». ytraynard.fr 2024 [En ligne]. Page consultée en 2024. <https://www.ytraynard.fr/2009/02/6-milliards-dautres/>
Yves Je te conseille alors d’aller à l’expo de Virilio et Depardon à la fondation Cartier. Certes des questions se posent aussi ! mais j’ai bien aimé leur maniére d’aborder le sujet sur la diversité huamine et son flux migratoire.
D’accord avec Pascal…
Il y a quelque chose qui me derange dans la demarche, et dans le resultat, chez Y.A.B. On est dans le spectacle comme le dit l’article plus haut, dans le sensationel, la juxtaposition a n’en plus finir… Bref on se retrouve en complete opposition avec le discours accompagnant le projet (questions simples et essentielles, proximite avec l’Autre, demarche « humaniste »…)
L’expo a la fondation Cartier, notamment autour du travail de Depardon sur une idee de depart a peu pres similaire, etait de tres loin superieure et donnait reellement voix au chapitre a l’alterite…
Je n’ai plus qu’à pleurer de Pékin d’avoir loupé cette exposition Raymond Depardon – Paul Virilio à la fondation Cartier, ainsi que celle de 2004-2005 (Depardon à la Fondation Cartier) dont la critique nous dit que le photographe arpente la planète, refusant ‘l’ événement’, le ‘spectacle du monde’ et privilégiant ‘le goût du réel, du documentaire, allié avec un refus de l’esthétisme’.Ayant vu La vie moderne avant de quitter notre vieille Europe pour la jeune Chine, et connaissant un peu le monde paysan français, j’avais été saisi de l’acuité du regard de Depardon forgé par ce temps long passé auprès de l’Autre. Une démarche à l’opposé de celle de YAB effectivement.
Je n’ai pas raté cette exposition, Yves, et tu n’as rien perdu. Elle était superficielle, dans l’air du temps: images baclées, phrases définitives. Le tour du monde de Depardon en huit jours est l’exemple même du projet idiot. Il a filmé tout et n’importe quoi dans l’urgence, à l’opposé absolu de son travail remarquable sur la paysannerie traditionnelle française en voie de disparition. Virilio passe en boucle cahotique, mal filmé, mal enregistré, en ânonnant un propos simpliste, tant il est réducteur, sur le futur de l’humanité en mouvement.