Août 172009
L’injustice face à la santé, dont personne ne conteste la réalité mais qu’on relègue souvent dans sa mauvaise conscience, vient parfois se rappeler à nous sous les traits hideux de l’arrogance du plus riche. Marc Gentili, assez au fait des questions sanitaires mondiales en tant qu’ancien président de la Croix-Rouge française, n’hésite pas à qualifier la grippe A/H1N1 de « pandémie de l’indécence »(*) tant les moyens mis en œuvre dans les pays riches dépassent non seulement la réalité de la maladie, mais ceux accordés à d’autres maladies bien plus dangereuses, comme le paludisme, qui tue en toute impunité un enfant toutes les 30 secondes… heureusement en Afrique(**). Avant lui, des voix s’étaient élevées contre le catastrophisme qui entoure cette « grippette » comme l’a qualifiée un autre spécialiste, le Professeur Bernard Debré(***). Pire, il semble dans cette affaire que les enjeux de responsabilité politique (un État doit certes protéger ses citoyens) se brouillent avec les intérêts économiques. Il est intéressant de constater que le principe de précaution – inscrit dans notre Constitution par Jacques Chirac en 2005 – semble d’application très variable. L’invoquerait-on que lorsqu’il arrange l’industrie ? S’il est appliqué de manière particulièrement cavalière dans le cas des ondes (antenne-relais, téléphone portable, wifi) pour ne pas pénaliser les opérateurs, il semble qu’il fasse ici l’objet d’une application rigoureuse pour favoriser l’industrie pharmaceutique qui rêve déjà de la manne annoncée d’un vaccin.
Dans les deux cas, il semble que l’on soit dans l’incapacité de gérer sereinement l’incertitude scientifique. Les terriens des pays du Sud seront sans doute ravis que l’on ait englouti les yeux fermés 1 milliard d’euros dans un vaccin. Quoi qu’il arrive les prochains mois, les précautionneux ont déjà gagné la partie ; si la pandémie reste modeste dans ses effets le mérite en reviendra aux 94 millions (!) de vaccins achetés sur plan et dont on ne connait pas même les conséquences.
Dans les deux cas, il semble que l’on soit dans l’incapacité de gérer sereinement l’incertitude scientifique. Les terriens des pays du Sud seront sans doute ravis que l’on ait englouti les yeux fermés 1 milliard d’euros dans un vaccin. Quoi qu’il arrive les prochains mois, les précautionneux ont déjà gagné la partie ; si la pandémie reste modeste dans ses effets le mérite en reviendra aux 94 millions (!) de vaccins achetés sur plan et dont on ne connait pas même les conséquences.
(*) La pandémie de l’indécence, Le Monde.fr, 06.08.09.
(**) Le paludisme en chiffre, MSF, 2008.
(***) Debré: « Cette grippe n’est pas dangereuse », Le Journal du Dimanche, samedi 25 Juillet 2009.