Août 112010
 
Approfondissant la connaissance de mon quartier, s’est posée rapidement la question de ses limites géographiques. Quel territoire recouvre donc Belleville ?
Si, aujourd’hui, ce vocable couvre administrativement le quart nord-ouest du 20e arrondissement, il n’en fut pas toujours ainsi et le flou reste bien entretenu. Quelques cartes vont nous aider à y voir plus clair.
Les historiens nous apprennent que le toponyme de Belleville n’apparait que tardivement, au cours du XVIe s.(*) Auparavant, le sommet et le versant occidental de la colline de Belleville furent désignés Savies, puis Poitronville(**). Il semble vain de chercher des limites précises à ces territoires qui désignaient un village dont l’extension a évolué au cours des siècles, mais dont le cœur semble avoir battu près de la station de métro Jourdain actuelle, à cheval sur le chemin de Paris, échappée nord-est de la capitale et future rue de Belleville. Domaine royal, la colline fit l’objet de donations, constituant progressivement des seigneuries plus ecclésiastiques que féodales, tandis que se formait progressivement un village d’affranchis. La Courtille, entre l’actuel boulevard de Belleville et la rue Saint-Maur, sera longtemps présentée distinctement de Belleville. Quant à Ménilmontant, il est généralement mentionné comme un hameau de Belleville. Forêt, champs, vignes, carrières, ruisseaux, il faut imaginer un Belleville très champêtre et très peu habité. Peut-être 5000 âmes à la fin du XVIIIe s.
Le premier document en ma possession faisant état de « frontières » précises de Belleville date de la Révolution. Rappelons que c’est en 1789 en effet que fut décidé d’unifier la nomenclature des territoires français. La commune éclipse la paroisse et devient la maille élémentaire. Sur ce plan, se trouve tracée la Paroisse St-Jean-Baptiste de Belleville, qui empiétait joyeusement sur quatre de nos arrondissements actuels : 10e, 11e, 19e et 20e. Mais quelques années avant la Révolution, la création du mur des Fermiers Généraux décida une fois pour toute que la Courtille était parisienne. Peut-être en consolation, la commune de Belleville qui se dessine à la Révolution est très étendue et empiète sur les paroisses voisines. Un vaste quadrilatère se dessine entre les boulevards extérieurs (limite de Paris en 1789) et le futur périphérique, englobant au nord, les Buttes-Chaumont, et rejetant au sud le cimetière du Père Lachaise. Ainsi définie, Belleville devient une commune du département de la Seine au même titre que Montmartre(***).
Avec la construction des fortifs par Thiers vers 1840 qui, rasées, deviendront nos boulevards des Maréchaux et périphérique, l’annexion totale de Belleville à Paris est inévitable. Ce sera chose faîte en 1860 avec la création des neuf derniers arrondissements. Belleville est à nouveau démantelée. Une moitié dans le 19e arrondissement, l’autre dans le 20e. Un découpage habile qui tend à juguler les ardeurs révolutionnaires du quartier. La magouille électorale est vieille comme l’élection. Et comme si ce partage ne suffisait pas, pour respecter la règle des 4 quartiers par arrondissement parisien, le quart Est de la commune de Belleville est détaché pour être baptisé Saint-Fargeau.
Il faudra attendre la création des Conseils de quartier (2002), pour que Belleville retrouve une existence plus large, au moins dans le vocable administratif. Si le Conseil de Belleville perd ce qui constituait le cœur du village (un comble !), il réapparait dans les onzième (Belleville-Saint-Maur) et dix-neuvième arrondissements (Bas-Belleville). Modeste justice pour ce quartier que l’immobilier a failli rayer de la carte dans les années 90.


Afficher Les Belleville sur une carte plus grande


(*) Bella villa super sabulum : Belleville sur Sablon
(**) Pierre-Thomas-Nicolas Hurtaut, Dictionnaire historique de la Ville de Paris et de ses environs, 1779.
(***) Voir Wikipédia, entrée Département de la Seine.