Mar 232010
Au sixième jour, le Réel s’offrit une pause, escale bien méritée après des séances quotidiennes de six heures de projection. Aujourd’hui, la pupille des festivaliers, habituée à l’obscurité des salles, se contracte brutalement sous l’effet de l’ardent soleil printanier. Marcher, musarder, l’heure est à la sérendipité et l’escale parisienne est bienvenue après ce périple documentaire qui a conduit les plus intrépides du Japon en Russie, du Brésil à l’Iran, d’Arménie en Chine et au Vietnam en passant par Londres, Jaffa et Clermont-Ferrand.
Mais suis-je seulement à Paris ? Dans la capitale, l’ailleurs est partout. Inscrit au visage de ses habitants, de ses visiteurs, de ses enseignes, de ses constructions, dans le nom de ses rues aussi. Nos capitales occidentales semblent les avant-postes d’un inéluctable métissage mondial. Cette « avance » sur le reste du monde, ce savoir-faire multiculturel qui ne s’élabore pas toujours dans la douleur, comme en témoigne le succès de ce festival de documentaires, est-il le dernier rempart contre l’oubli auquel nos petites métropoles semblent condamnées face à l’implacable démographie des pays en développement ? Deviendrons-nous l’espace muséifié d’une brillante civilisation matérielle et intellectuelle émergée au XVIe s. et qui s’est assoupie à la fin du XXe siècle ? Réponses dans une centaine d’années(*).
Mais suis-je seulement à Paris ? Dans la capitale, l’ailleurs est partout. Inscrit au visage de ses habitants, de ses visiteurs, de ses enseignes, de ses constructions, dans le nom de ses rues aussi. Nos capitales occidentales semblent les avant-postes d’un inéluctable métissage mondial. Cette « avance » sur le reste du monde, ce savoir-faire multiculturel qui ne s’élabore pas toujours dans la douleur, comme en témoigne le succès de ce festival de documentaires, est-il le dernier rempart contre l’oubli auquel nos petites métropoles semblent condamnées face à l’implacable démographie des pays en développement ? Deviendrons-nous l’espace muséifié d’une brillante civilisation matérielle et intellectuelle émergée au XVIe s. et qui s’est assoupie à la fin du XXe siècle ? Réponses dans une centaine d’années(*).
(*) Billet inspiré (mais hélas non sponsorisé) par le plaisant et cosmopolite St-Christopher’s Paris, hostel parisien à l’asiatique, posé sur le bassin de la Vilette dans les locaux d’anciens squats d’artistes(*). Lit en dortoir autour de 30€, chambres doubles à 80€. Petit-déjeuner inclus. Membre du réseau famous hostels.
Pour citer cet article (format MLA) : Traynard, Yves. « Relâche ». ytraynard.fr 2024 [En ligne]. Page consultée en 2024. <https://www.ytraynard.fr/2010/03/relache/>
L'exotisme, mon cher Yves Watson, l'exotisme, toujours l'exotisme. Oui, Paris devient exotique pour nous, et l'est sans doute moins pour nos hôtes chinois ou maghrébins que par le passé. L'exotisme, c'est une façon de voir l'autre. et moi, c'est dans le 8e et dans le 16e arrondissements que je me sens le plus étranger, au coeur de cette France blanche où toutes les femmes sont en tailleur et en jupe noire, tous les hommes en costume. Je m'y sens dans un ghetto.
L'internationalisation actuelle de Paris, outre le fait qu'elle n'est pas récente (après tout, Belleville ne s'est bâti que sur des apports étrangers) m'évoque des villes cosmopolites mythiques, Istanbul, Smyrne, Trieste… L'histoire se perpétue dans un glissement géographique. si Paris recrée la richesse culturelle deu Berlin des années Vingt, quelle chance!
Il n'y a pas l'ombre d'une déploration dans mon billet. Ce qui m'inquiète c'est qu'effectivement on ne transforme pas l'essai. Qu'il soit aussi difficile de voir dans cette matière en fusion un atout et non un handicap, que notre société dans son ensemble – et pas seulement le libéralisme économique – ne soit pas à même de lancer de véritables projets de société autour de cette donne qui pour moi, me semble nouvelle.
Car je suis persuadé que les migrations – pas seulement de population mais aussi des cultures – récents et à venir ont changé d'échelle voire de nature. Contrairement aux siècles précédents, l'immigration est beaucoup plus cosmopolite, l'expatriation temporaire une banalité, le métissage plus ardent a quitté les grandes escales de la mondialisation pour s'immiscer jusque dans la France profonde. Le mouvement me semble devoir se prolonger et gagner toute la planète. Il accompagne d'importants flux de marchandises et utilise des modes de communication très développés qui réduisent les distances à la vitesse de la lumière. Beaucoup de spécificités sont en train de disparaitre et les modes de vie (et les cultures) s'uniformisent à travers l'organisation du travail et la consommation. A situation nouvelle, il me semble qu'il faudrait des réponses nouvelles sous peine de nous transformer, aux yeux des futurs pays dominants, en simple satellite touristique et non en espace vivant, créatif. Nos atouts sur la scène internationale sont, outre nos technologies et nos outils intellectuels hérités des Lumières qui devraient nous permettre de penser le monde plutôt que de le réduire à notre seul champ, justement notre cosmopolitisme.