La vérité – dit-on – sort de la bouche des enfants. Mais puisqu’il n’y a guère plus de vérité en photographie qu’en art en général qu’est-ce qui motive ces multiples expériences photographiques dont les enfants sont les acteurs ? C’est que contrairement aux photographes patentés, les enfants ne s’embarrassent pas d’esthétisme pesant et surtout ils passent innocemment partout pour nous révéler un autre point de vue souvent inaccessible aux adultes tant techniquement qu’intellectuellement. C’est une des raisons d’être de ces expériences menées un peu partout à travers le monde. Le procédé est désormais classique. On remet des appareils photos jetables aux enfants, on les briefe avant de les lâcher dans la nature. Après quelques semaines on ramasse les «copies» et on expose une sélection des oeuvres toujours amusantes, souvent convenues mais parfois inattendues. A Maputo(*) l’expérience concernait une école rurale et une école urbaine. Des yeux exercés ont croqué un mur entre deux espaces qui symbolise si bien la fracture sociale ; des sandales plastique sèchant au soleil dans la cour d’une paillote, repos mérité… L’analyse de chacune de ces photos est autant affaire de cœur que de raison.
La remise des attestations de participation nominative (il n’y avait pas de concours) s’est déroulée au CCFM en présence de la représentante de l’UNICEF devant des enfants un brin intimidés. Mes copains de MozambiCanon étaient de la fête en tant que sponsors de la manifestation. Je dis copains puisqu’on avait sympathisé à l’inauguration de Photo Festa. En bon client Canon comme l’attestait ma bandoulière j’avais eu droit au tirage de mon portrait sur imprimante couleur photo ! Nous échangeons sur le numérique(**) et sa faible implantation au Mozambique. Ici, pour des raisons de coût, la technologie numérique reste réservée aux professionnels et aux grandes compagnies (dans le domaine de la reprographie). Le tirage 10*15 est à 10 MTn soit 0,30 euros(***). Je reste persuadé que malgré le poids de l’investissement initial, les photographes de rue auraient intérêt à passer au numérique. Ils utilisent tous un coûteux reflex totalement sur-dimensionné alors qu’un simple compact à 4 millions de pixels ferait tout aussi bien l’affaire compte tenu de la qualité et du format des tirages limité au 9*13. Mais reste à convaincre… les clients. Un photographe avec un petit appareil ça fait pas sérieux !
A voir, toujours au CCFM, l’extraordinaire exposition d’Helga Kohl(****). Il y a du Magritte et du Dali dans ces maisons englouties lentement par les dunes namibiennes.
(*) Crianças com Câmaras. CCFM. 21 Outubro à 15 Novembro.
(**) les Mozambicains utilisent le terme anglais «digital»
(***) chez Sun Express le Chinois de l’Avenue Lénine. Ca ne s’invente pas !
(****) Helga Kohl a fait l’affiche au sens propre des 6es Rencontres africaines de la photographie de Bamako («Un autre monde»).
Pour citer cet article (format MLA) : Traynard, Yves. « Crianças com Câmaras ». ytraynard.fr 2024 [En ligne]. Page consultée en 2024. <https://www.ytraynard.fr/2006/10/criancas-com-camaras/>